30.10.15

Deadly Class, tome 1 : Reagan Youth

"Un jour tu nais, un jour tu meurs, entre les deux, tu m'dois de l'oseille !"
En 2013, malgré son analyse tranchante de la société moderne, le philosophe urbain Ablaye oubliait dans son schéma une étape primordiale pouvant modifier la quantité dudit oseille à notre disposition ou même raccourcir la distance vers le point final de notre existence : le lycée.

Heureusement pour l'humanité, cette méprise fut corrigée un an plus tard par Rick Remender, un auteur de comics connu pour ses œuvres aussi jouissives que psychologiques. En janvier 2014, les lecteurs d'Image Comics découvraient ainsi avec Deadly Class, une vision ô combien juste, certes emprunte de nostalgie des années 80 (dans lesquelles grandirent notre auteur) et sublimée par les codes de la pop culture, de notre passage par la case lycée.

College Dropout

Deadly Class, c'est l'histoire de Marcus Lopez, un jeune orphelin dont le seul et unique but dans la vie est de se venger de Ronald Reagan, responsable selon lui de la mort de ses parents en ayant fermé les hôpitaux psychiatriques dans les années 80. En effet, tel une version masculine et américaine d'Amélie Poulain, Marcus a vu ses parents périr sous ses yeux, écrasés par le corps d'une malade mentale privée de soins par la faute de la politique médico-sociale du 40ème président des États-Unis.


Après un séjour plus que désastreux à l'orphelinat, notre "héros" se retrouva SDF à l'âge de 16 ans et avec autant de perspectives d'avenir qu'une dinde à Thanksgiving (ou qu'un mouton lors de l'Aïd al-Adha, c'est comme vous voulez). "Heureusement", dans son malheur Marcus disposait de tendances psychotiques, ce qui poussa l'Académie Kings Dominion des Arts Létaux à le sortir de la rue afin de lui donner une chance d'utiliser au mieux ses prédispositions pour la violence au milieu des enfants des pires crapules du monde.



Le problème, c'est que lorsqu'on est le petit nouveau dans un tel cadre académique, les pires ruelles mal-famées sont parfois plus rassurantes que les salles de cours et les rapports avec les autres élèves.




Rick Remender n'est bien sûr pas le premier auteur à utiliser l'univers du lycée en toile de fond pour ses récits, les interactions sociales pendant cette périodes étant si nombreuses et "brutales" qu'elles offrent un terreau propice aux interprétations les plus folles. La particularité de Deadly Class, c'est le naturel et la sincérité avec lequel l'auteur transpose les codes et névroses de tout lycéen ordinaire dans un univers où la moyenne trimestrielle dépend de la manière dont on surine son prochain. L'auteur avoue d'ailleurs que le récit est largement inspiré de sa propre expérience au lycée en tant qu'adolescent un peu marginal des années 80 dans un bled où on pouvait se prendre une balle dans la tête pour un regard mal placé ou pour avoir traité avec le mauvais dealer.

I'm in Love with the coco




Et puisqu'il est question de drogues, Rick Remender ne pouvait aborder les années 80 sans faire référence à la banalisation de la cocaïne dans les habitudes de consommation des jeunes américains grâce aux cartels colombiens (cf. Narcos pour plus de précisions). Mais la "C" n'est pas le seul psychotrope évoqué dans Deadly Class et les pensionnaires l'Académie Kings Dominion des Arts Létaux trouveront des échappatoires à leur mal-être, l'occasion pour Craig Wes de donner naissance à des scènes hallucinées avec son style graphique nerveux sublimé par les couleurs psychédéliques de l'explosif Lee Loughridge.

Deadly Class est une œuvre hautement addictive à plusieurs niveaux, que ce soit pour la sincérité de quasi biographique de son scénario ou par le dynamisme de son découpage qui vous rendra encore plus accros si vous partagez la tendresse de l'auteur pour les années 80 et l'imagerie qui entoure cette période d'effervescence sociale et culturelle. Vous pourrez d'ailleurs écouter la playlist Deadly Class composée par Sir Remender himself pendant votre lecture : les 80's dans vos yeux et vos oreilles !



Alors, elle a quel goût cette BD ?

Caractéristiques principales
  • Genre : Action, drame
  • Style graphique : Cartoony entre BD franco-belge et comics indépendants
œuvres similaires
  • BD et romans : Les lois de l'attraction, Cherub , Battle Royale et les récits initiatiques sur l'adolescence
  • Ciné & TV : The Lost Boys/Génération perdue, Popular (oui, la série comique)
  • Jeux Vidéo : Persona et DanganRonpa
  • Musique : The Pixies, Joan Jett, Agent Orange et à peu près tout ce qui sonne subversif venu des eighties

Pour les amateurs d'action déjantée et de récits politiquement incorrects. À réserver à un public averti pour ses scènes de consommation de drogues décomplexées et pour sa violence crue.

Pretty Deadly, tome 1 : Reagan YouthAuteurs : Rick Remender (scénario), Craig Wes (dessin) & Lee Loughridge (couleur)
Éditeur : Image Comics (USA) / Urban Comics (France)
Nombre de pages : 160 pages
Prix : 10,00 €

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